Cage d’ombre
Escalier solitaire
Damier célibataire
Contre-nuit
Point de fuite
Ombre ou reflet
Ombre I
Ombre II

ESTAMPES


Au seuil de notre parcours dans les dédales de la ville, nous découvrons ces tableaux d’ombres, composés de grands aplats géométriques, rythmés par des lignes brisées. Le tableau d’ombres est bien plus qu’une modalité de représentation, il permet de déployer un schéma narratif dans ce moment d’éclipse du sujet contemporain. Les ombres en jachère constituent une réserve de formes instables et provisoires, elles renvoient l’image d’un monde fragmenté.

Ces estampes s’inspirent de la photographie, de son style, de son graphisme, de ses contrastes. Ces images éphémères renvoient à une architecture mystérieuse par ses ombres et ses reflets, ses images mouvantes et déformées.

De ces images on ne reconnaît pas grand-chose de l’ordre d’une construction ajustée et épurée. Quelque chose s’est perdu d’une maîtrise du bâti, les parcours dans la ville nous offrent désormais des images de hasard. Ombres et reflets déjouent le calcul des architectes et trahissent la solitude des passants : places désertes, géométrisation des ombres. Le passant disparaît dans l’ombre pour réapparaître dans la lumière, tel est le parcours du nouveau sujet de la représentation, il n’a d’existence qu’éphémère. Les rapports de l’objet à son ombre ou à son reflet sont des rapports projectifs.

Nous pouvons nous faire une idée assez précise du phénomène de projection qui organise les rapports entre l’objet et son ombre, l’ombre ne constituant qu’une image déformée et changeante de l’objet. Ainsi nous contrarions les règles de la perspective pour leur substituer l’aléatoire et le précaire et nous déjouons les règles de la photographie, pour en recueillir les déchets, en privilégier certains détails qui dérangent et qui font tache dans l’image.

Le titre de l’estampe oriente la création de l’image. Séquences de mots, souvenirs de rêves, le titre introduit l’image dans une trame signifiante et l’image des tableaux d’ombre et de lumière de la ville prend alors consistance.

La fenêtre au fond de la Cage d’ombre ne s’ouvre sur rien, ainsi le regard est un oiseau résolument encagé qui ne peut s’échapper. Le regard ne s’ouvre plus dans l’encadrement de la fenêtre sur la ligne d’horizon. La géométrisation des ombres du Damier célibataire nous livre des images de tableaux abstraits où la perspective a disparu. Les façades entièrement vitrées des immeubles renvoient des zébrures de couleurs sur fond d’images disloquées.

L’espace géométrisé de nos villes ne consent qu’à la pureté des lignes et à l’absolue netteté des formes. Escalier solitaire rend compte de l’exclusion de l’habitant, trouble-fête d’une perspective architecturale tournée sur elle-même.

Contre-nuit ne s’oppose pas à contre-jour. L’obscurité n’est pas seulement absence de lumière, elle est visible et c’est elle qui nous regarde. La ville moderne génère des zones d’ombre d’où nous sommes vus de toutes parts.

Point de fuite joue de l’équivoque entre l’impossible fuite et le lieu de convergence des lignes de fuite. Ombre ou reflet place le spectateur face à un choix, l’oblige à se déterminer, à sortir de l’indécision. Seule l’ombre se traverse et se contemple de l’intérieur.

Ombre I, II, III, IV, V, VI se découvrent au hasard des parcours urbains. Les ombres occupent une place majeure dans l’agencement du bâti. Les ombres en mouvement reconstruisent la ville dans une progression implacable. Ombres rampantes et dévorantes, elles engloutissent des pans entiers de la ville. Elles se répandent dans un double mouvement d’agrandissement et de rétrécissement où s’inscrit la temporalité. L’ombre déforme et caricature son modèle, elle devient la grimace d’une architecture soignée et ordonnée.

L’ombre est anonyme et insaisissable. Elle n’est jamais noire ou impénétrable mais composée de multiples variantes de couleurs. Son intensité ne vaut que d’un point d’observation situé en pleine lumière et apparaît dans un antagonisme à la lumière. Avec Pleine lumière une géométrie de couleurs enserre des reliquats d’ombres. Tristes couleurs ornées de vives zébrures.

Anamorphose est une déformation de l’image d’origine, une compression méconnaissable. C’est une déréliction des formes, une image à la fois étrange et familière. Grand géomètre, formes brisées et altérées des ombres. Cité idéale où le plan de la cité prend forme de lettre, où la ville idéale projette ses ombres de manière anticipée et organisée.

Les estampes présentées ici sont réalisées au pochoir sur des plaques de zinc de format 30cmx40cm. (Dimension de l’image 30cmx40cm, dimension du cadre 40cmx50cm). La plaque n’est pas creusée et nous appliquons l’encre au rouleau. Les aplats de couleur peuvent se chevaucher ou se superposer.

Ombre III
Ombre IV
Pleine lumière
Anamorphose
Ombre V
Ombre VI
Grand géomètre
Cité idéale

IMPRESSIONS SUR TOILE

La trace d’animaux ou d’hommes sur le sol est souvent qualifiée d’empreinte, c’est ce qui reste du contact de l’homme ou de l’animal sur le sol meuble. L’empreinte est le produit du contact physique, qu’est la pression d’un corps sur une surface meuble. Elle nous confronte à la certitude d’une présence passée encore visible. Quelque chose de l’être du vivant s’y est déposé sous forme d’un fragment d’image. Ce qui reste du passage de l’être vivant, c’est un fragment qui se détache de l’image du corps.

Après l’avoir vérifié dans ce qu’on appelle zone naturelle sensible, la trace aléatoire est recherchée pour ce qu’elle vaut, soit le témoignage d’une nature préservée. Dans notre monde contemporain, il n’y a pas de méta-nature, il n’y a que nature-en-voie-de-disparition. La matérialité de la trace commande la survie des espèces animales, trace de congénère, trace de proie, trace de prédateur. C’est proprement l’avantage du monde animal sur les espèces dites supérieures que de savoir lire les traces.

Le trait du graveur ne constitue pas une trace naturelle, elle en adopte cependant un caractère essentiel, à savoir la marque creusée sur un substrat, le bois, le lino, le métal ou toute autre matière. Le graveur est lié à la corporéité et la matérialité du substrat sur lequel il opère.

Ce que chaque graveur, à sa façon cherche à démontrer, c’est la persistance des traces comme voie ouverte à la civilisation. La matérialité de la trace est le témoignage d’une vérité historique, marque identifiable ou parfois illisible. La trace appelle son effacement et c’est à sa restauration que le graveur se consacre. Le graveur est un éclaireur que l’on envoie au devant de la troupe pour lire ses propres traces.

Vallons, bois et collines, figures champêtres aux allures d’esquisses, là se creusent les sillons qui préfigurent ce qui s’imprimera sur la toile. Les sillons se succèdent en arcs concentriques. Les empreintes sont réalisées sur une matrice tendre grâce au tranchant de la pierre. C’est dans le sens d’un progrès que l’usage du tranchant de la pierre s’est imposé. L’irrégularité du tranchant fait vibrer la ligne et la sinuosité des entailles compose la rotondité du relief.

Les impressions sont réalisées sur toile de coton demi-natté. Dimension de la toile : 1,80m X 1,40m.

Cinq matrices sont nécessaires pour imprimer une toile. Dimension des matrices : 15cm X 15cm.

RELIURES AUTOMATIQUES

Ces dispositifs automatiques sont des machines à ouvrir et fermer des reliures. Elles font appel à un système mû par un petit moteur électrique. Les deux plans articulés de la couverture s’ouvrent en permettant le dépliage d’une forme en trois dimensions. Nous avons deux mouvements : le premier est circulaire, autour d’un axe, le second de bas en haut induit par la rotation du bras et de haut en bas dû à la pesanteur. Le mouvement de rotation est continu, le mouvement vertical est discontinu, alternant entre montée et descente. Un autre dispositif permet de dérouler puis d’enrouler la longue page d’un volumen. Un dernier dispositif autorise la rotation alternée de trois rouleaux horizontaux.

Ce système permet d’ouvrir et fermer, d’étendre et de replier, d’alterner des rotations. Ici, l’observateur ne manipule pas la reliure puisqu’il se contente de suivre le mouvement de la machine. Le plaisir de voir fonctionner un système automatique se substitue au plaisir de découvrir en manipulant la reliure.

Pour voir, il faut s’abstraire de la fascination propre à l’image fixe et regarder autrement ces défilés d’images. Là aussi, dans ce défilé d’images, il y a ce que le mouvement laisse voir et ce qu’il ne laisse pas voir. Il y aurait donc des images isolées et des images supportées par un dispositif mécanique. Les mouvements répétitifs de l’automate captivent le spectateur, il y recherche l’indice d’une programmation. La reproduction d’actions prédéterminées sans intervention du spectateur, l’alternance répétitive et le battement sans fin du même annoncent l’absence de surprise dans ces mouvements qui se répètent à l’infini.

L’appareil, c’est un dispositif préparé à l’avance, c’est un assemblage d’éléments hétéroclites. Ce qui compte dans l’appareillage, c’est l’impression produite par l’ensemble, c’est le bel aspect, l’économie de moyens pour obtenir un résultat. L’énigmatique machine nous montre ce qu’elle est capable de faire. L’automate substitue la machine au corps et exécute l’opération qui relevait spécifiquement d’un corps en action. La reliure automatique est un système objectivement circonscrit : les durées d’ouverture et de fermeture sont constantes. Par l’artifice du système automatique nous rendons tangible l’invention du livre.

L’observateur est toujours fasciné par la succession réglée des allers et retours et par le dispositif qui commande l’ouverture et la fermeture de la reliure. La fermeture annule ce que contient la reliure, l’ouverture rend présent ce que la fermeture avait fait disparaître. La fascination se double d’une satisfaction à retrouver ce qui avait disparu. Les deux mouvements, circulaire et vertical sont en cause dans l’effet hypnotique produit. Le mouvement d’ensemble a pour effet de capter le regard du spectateur. L’alternance répétitive se soutient d’une symbolisation élémentaire, ce qui entraîne l’annulation de l’objet.

Livre tracté, démonté, mécanisé, animé, comment inclure des machines dans les livres pour en faire des livres automates. Le livre ne rentre pas facilement dans un dispositif automatique avec ses pages innombrables et sa structure complexe. Il ne s’agit pas tant de lire le livre que de faire quelque chose du livre, de s’en servir autrement.

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